mardi 24 mai 2011

"Toujours sur le métier, remets ton ouvrage..."

La préparation d'une bande dessinée est un long travail pendant de nombreux mois, peut-être un an, voire deux. Le dessinateur - ne parlons pas de la partie "scénario", qui est un tout autre domaine - doit très souvent exécuter des brouillons pour s'assurer de la justesse des anatomies, de l'harmonie de ses mises en page et du bon choix de ses plans et cadrages. Il doit aussi "faire ses gammes", comme un musicien, pour ne pas perdre le coup de main. Or, ces croquis sont rarement repris dans les planches finales ; en voici quelques-uns - inédits, et pour cause - de Francis Nicole, retrouvés après la parution des albums Missions Kimono n° 10, 11 et 12 (le 12 étant le dernier en date, sous le titre Top Attaque), et de Patrick Dumas après la publication d'Allan Mac Bride 3.

Xavier Mittelberger, dit "Mittel", est le personnage principal de la série Missions Kimono ; un surplus de croquis s'impose :

Dans Top Attaque, le capitaine du Winner a un air de ressemblance (voulu par Francis Nicole) avec le célébrissime capitaine Haddock (il a même un très lointain air de ressemblance - et ça, c'était voulu par JYB...) :

Différents personnages sur les bateaux de la Marine nationale, comme on en voit régulièrement dans la série Missions Kimono :

Même une main - surtout une main ! - doit faire l'objet de toute l'attention d'un dessinateur. Un dicton connu proclame : "Si vous savez dessiner une main, vous savez tout dessiner..." :

Mittel et l'interprète pakistanaise Sadia ont eu bien du souci dans l'album Missions Kimono n°10, La nuit du Caracal, où un clone du chef terroriste Ben Laden les retenait prisonniers, quelque part dans les hautes montagens d'Arakistan (pays fictif ; toute ressemblance avec un pays réel ne serait pas vraiment fortuite) :

La mise en page d'une seule planche demande aussi un travail préparatoire. Voici par exemple l'une du début de l'album L'"Oiseau des Îles" (Allan Mac Bride n°3), par Patrick Dumas qui opère différemment de Francis Nicole :

lundi 16 mai 2011

Les derniers Tigres de Cambrai

La fête aérienne sur le terrain d'aviation de Cambrai-Niergnies, dans le département du Nord, célébrait hier dimanche le cinquantième Tiger Meet, et le dernier qui se déroulait sur la base militaire de Cambrai-Epinoy, proche de là.
Un Tiger Meet rassemble de nombreux avions de guerre ayant pour emblèmes un tigre ou un félin. Pour l'occasion, avions et pilotes européens, américains et même d'autres nations, arborent des signes particuliers avec force zébrures noires et fauves.
Hélas, la base d'Epinoy va fermer l'année prochaine, ce qui provoque un traumatisme dans toute la région.
Francis Nicole, dessinateur de la série Missions Kimono, et moi-même, nous nous devions d'être présents : un de nos albums de BD, le numéro 8 intitulé Tiger, raconte justement, dans un récit de fiction, un Tiger Meet se déroulant à Cambrai. En voici une vignette montrant les décorations des appareils (ici un Mirage français et un Alpha-Jet portugais) :
Ainsi, la base aérienne de Cambrai n'aura pas totalement disparu, puisqu'elle sert de décor à une bande dessinée...
Et voici une autre vignette, caractéristique du folklore qui accompagne tout Tiger Meet (à droite, le héros de Missions Kimono, Mittel, avec un béret et une écharpe rayés ; à gauche, la célèbre pelisse tigrée) :
Il nous faut remercier la flottille 11F, basée à Landivisiau, "héroïne" de la série BD, et une habituée des Tiger Meet, auxquels participent ses avions depuis une quarantaine d'années : nous avons pu profiter de son stand pour proposer les albums de la série. La meilleure vente fut le titre... Tiger bien sûr !
Voici, ci-dessous, le stand de la 11F, côté piste. C'est le matin et les visiteurs commencent à arpenter les allées, tandis que Francis (assis à gauche) et l'ami Romain, des Traditions de la 11F (debout), se préparent à recevoir les premiers fanas d'écussons, badges, T-Shirts, polaires, marque-page, etc. A gauche, sur le capot de la voiture, c'est un gros tigre... en peluche...
Le stand, côté parkings (ci-dessous), montre un "kakémono" de la couverture de l'album Tiger ; plus d'un visiteur s'est fait photographier devant cette affiche plastifiée, qui a même été longuement filmée par une équipe de l'ECPA (Etablissement cinématographique des Armées)...
Ci-dessous : Francis à l'oeuvre, sur une table recouverte d'une nappe tigrée (forcément !). Le vent frais l'a gêné pour dessiner les dédicaces réclamées par les clients. Il a pu dédicacer un album entre autres pour le "pacha" de la 11F, présent également sur le terrain et qui nous fit l'honneur d'une visite.
Nous avons aussi pu retrouver Raymond Legrand, grand fan et grand connaisseur des Tiger Meet, peintre à ses heures, et surtout co-scénariste de l'album Tiger. Le voici à gauche, avec un foulard "tigre", sur cette photo d'Eric Cartigny (JYB est au centre, et Francis Nicole à droite) :

Pour l'anecdote : j'ai profité du voyage dans le nord, en voiture, pour prendre des photos d'un de mes sujets de prédilection : les anciennes publicités murales peintes. Ici, une superbe "Vichy" sur la route de Péronne...

lundi 9 mai 2011

Le sosie du capitaine

Dans L'Oiseau des Îles, troisième titre de la série Allan Mac Bride, notre héros fait un bout de chemin (maritime) avec un certain capitaine Robert Orcade. Ce dernier commande le voilier dans ses pérégrinations à travers le Pacifique sud. Or, le personnage a vraiment existé. Le commandant du vrai Oiseau des Îles (voir le message du 16 février dernier) fut un temps un certain Robert Argod. Jeune officier à la compagnie des Messageries maritimes vers 1949, Robert Argod escala un jour à Tahiti... et ne voudra plus quitter la Polynésie. Il s'engagea alors dans une compagnie locale et devint le commandant de diverses goélettes effectuant des liaisons entre les îles, souvent pour le compte du Gouvernement. Son principal bateau fut L'Oiseau des Îles (et par la suite une autre goélette, entièrement à moteur celle-là, L'Oiseau des Îles II). Voici, à côté d'une image dessinée par Patrick Dumas et extraite de l'album, un portrait de Robert Argod remontant aux années cinquante :
Ensuite, Robert Argod revint en France où il devint professeur à l'école de la marine marchande de Marseille ; ses cours magistraux restèrent longtemps dans les mémoires de ses élèves.
Car l'homme était très cultivé. De son séjour dans le Pacifique, il garda toute sa vie un intérêt majeur pour les peuples polynésiens, leurs migrations millénaires et leur origine. Il tira deux ouvrages, à tirage confidentiel, de ses réflexions et de l'étude des légendes locales.
J'ai eu la chance de l'avoir connu. Je me suis procuré ses deux livres, j'ai pu discuter à plusieurs reprises avec lui de sa théorie, et il m'a fait cadeau de ses souvenirs manuscrits. C'était l'homme idéal pour incarner le capitaine Orcade dans Allan Mac Bride. Le scénario de l'album, qui lui doit beaucoup, est d'ailleurs basé sur certains souvenirs de navigation et sur les découvertes et descriptions du vrai commandant Argod.
Voici, en guise de salut à cet homme remarquable, une photo de L'Oiseau des Îles qu'il m'avait envoyée un jour :

lundi 2 mai 2011

Le chef terroriste Ben Laden : mort ou vif ?

L'annonce, ce jour, de la mort tragique du chef terroriste Oussama Ben Laden, tué par un commando d'élite des forces américaines sur le territoire pakistanais, rappellera aux lecteurs de la série BD Missions Kimono le long cycle formé de six albums successifs, du tome 5 au tome 10. Cette suite exceptionnelle d'aventures trépidantes, mettant en scène des pilotes de l'Aéronautique navale française, souvent basés sur le porte-avions Charles de Gaulle, a pour personnage principal et ennemi public n°1 le puissant chef terroriste Tarik Ben Kadar, surnommé TBK ; dans la fiction, le réseau de TBK, inspiré de loin d'Al-Qaeda, s'appelle Al-Mountaqimoun (ce qui signifie en arabe : La Vengeance ; tout un programme...).
L'arrestation de Ben Kadar, dans le dernier tome titré La nuit du Caracal et publié il y a un an, a des airs de ressemblance avec l'opération réelle contre Ben Laden. Sauf que dans la fiction, ce sont les Français qui mènent seuls l'opération - ce sont les héros de la série... La plupart des éléments évoqués aujourd'hui dans les médias figurent déjà dans la BD, comme la duplicité de certains clans au Pakistan (mis en évidence dans le tome 9, titré Pour Sadia) ; la difficile et longue traque du chef en fuite... (voir ci-dessous).
... Apparaissent également dans la BD la coopération (avec parfois des coups bas...) entre les Américains et en particulier les Français dans les opérations militaires antiterroristes en Arakistan, le pays fictif que l'on reconnaît comme étant l'Afghanistan avec une pincée de consonances réelles comme Pakistan, Kazakhstan, etc ; l'envoi, de nuit, de commandos héliportés et spécialisés (équipés de JVN, ou jumelles de vision nocturne) ; les interrogations sur l'identité réelle de la personne à arrêter (voir ci-dessous) ; etc.
Une prémonition (ou une coïncidence ?) parmi d'autres : il est question qu'un hélicoptère américain s'est crashé et a pris feu dans l'opération contre Ben Laden ; il semble qu'il ait eu un ennui technique et que les militaires l'aient fait sauter pour ne pas l'abandonner sur place intact (pratique courante). Or, dans La nuit du Caracal, on trouve une double scène identique (crash d'un des hélicos de la mission, puis destruction provoquée volontairement par l'équipage) ; voir ci-dessous :
Autre similitude entre la BD et la réalité : comme pour Ben Laden la nuit dernière, un drone, dans La nuit du Caracal, survole le lieu de résidence secret de Ben Kadar et aide de façon capitale les commandos ; voir ci-dessous la référence dans l'album :
Ces observateurs, devant leurs écrans, s'aperçoivent de faits curieux ; par exemple, dans la réalité, les occupants de la résidence de Ben Laden brûlent leurs déchets pour ne pas laisser de traces, ce qui finit par mettre la puce à l'oreille des agents de la CIA ; dans la BD, le lieu d'aisance des habitants de la grotte où se planque Ben Kadar est un peu à l'écart et, bien que noyé dans le relief montagneux, attire l'attention et le soupçon, grâce au drone... On a appris aussi qu'au moment de son arrestation, Ben Laden s'est servi d'une femme de son entourage comme d'un "bouclier humain" ; dans la BD, Ben Kadar a pris en otages deux personnages : le héros Mittel (pilote de l'Aéronavale) et une femme, Sadia, une interprète pakistanaise qui, à un moment, sert aussi de bouclier humain alors que le chef terroriste veut adresser à la France un message menaçant ; Mittel, de son côté, cherche un moyen d'éloigner son amie :
Toutefois, trois faits diffèrent, entre la fiction et la réalité. Quoique... Ben Kadar est arrêté dans les montagnes arakistanaises, et non dans un endroit civilisé au Pakistan (bien qu'une image, à la fin du tome 6 titré Piège à Koh-e-Shar, montre Ben Kadar dans une ville du Moyen-Orient, sans doute au Pakistan, à peu près libre de ses mouvements et donc capable, comme  Ben Laden, de quitter ses montagnes isolées) ; par ailleurs, pour ne pas en faire un martyre, les Français font tout pour capturer Ben Kadar vivant et le ramener clandestinement dans un pays occidental où il sera jugé (mais on apprendra au cours de la soirée du 2 mai que c'était la consigne donnée aux commandos SEALS américains).
Quant aux Américains (dans la BD), ils sont laissés à l'écart de la mission à la suite d'une imposante opération de diversion des Français, et n'interviennent qu'après coup... (voir ci-dessous) ; dans la réalité, ce fut en quelque sorte l'inverse : les Américains ont agi totalement à l'insu des Français (et du reste du monde d'ailleurs)...
Nous avons aussi appris au cours de la même journée du 2 mai que le corps de Ben Laden a été immergé en pleine mer aussitôt enlevé par les commandos américains. C'est justement une possibilité que j'avais envisagée au moment de concevoir le scénario de La nuit du Caracal : Ben Kadar pourrait-il être tué et "liquidé" définitivement par une immersion en mer  ? Une fin que j'ai finalement très vite écartée dans le cadre de la série Missions Kimono, pensant cela difficilement imaginable. Et pourtant... La réalité dépasse la fiction !
Le corps de Ben Laden a été immergé depuis un porte-avions US croisant au large du Pakistan (selon les informations divulguées ce 2 mai par les médias). Je pensais aussi, lors de la préparation du scénario, ramener Ben Kadar (vivant, donc) sur le porte-avions français Charles de Gaulle qui, dans la réalité comme dans la BD, croisait au large du Pakistan lui aussi ; mais les hélicoptères utilisés dans mon scénario n'ont pas le rayon d'action suffisant pour rejoindre d'une traite et sans risques la haute mer depuis le lieu de la capture (un lieu d'ailleurs moins éloigné de la mer que la ville d'Abbottabad où a été tué Ben Laden, d'où mon interrogation pour savoir comment, pratiquement, le corps a été transporté nuitamment sur le porte-avions américain ; la réponse sera sans doute révélée dans les jours qui viennent). Aussi m'a-t-il fallu abandonner cette idée pour la remplacer par celle qui figure à la fin de La nuit du Caracal (exfiltration par un avion français insoupçonnable, basé en Afghanistan et embarquant une caisse anodine contenant en fait, à l'insu de tous, le corps endormi de Ben Kadar ; voir ci-dessous).

Top Attaque, c'est fini...

La diffusion de l'histoire en BD Top Attaque s'est terminée hier sur le blog. Francis Nicole et moi espérons que vous avez pris plaisir à la lecture des planches, jour après jour. Les lecteurs intéressés peuvent trouver en librairies, depuis le 29 avril, l'album qui en découle.
Curiosité : le cargo Winner, détruit par des missiles à la fin de l'histoire, a réellement existé, sous ce nom. Hasard : alors qu'il stationnait depuis des années dans le port de Brest, où il était amarré après une saisie par la police, il a été démoli début 2011, au moment où Francis Nicole le dessinait, dans les planches finales, en train de disparaître sous les eaux de l'Atlantique équatorial...  Cette coïncidence ne pouvait bien sûr pas être prévue ni calculée lorsque j'ai conçu l'histoire (qui débute avec le tome 11 préparé courant 2009). La photo ci-dessous (due à Erwan Guéguéniat) le montre fin 2010 sur sa cale de "déconstruction" comme on dit. Il lui manque déjà de nombreux éléments (portique, mâts de charge, embarcations de sauvetage..) et son état s'est fortement dégradé.

A signaler que la documentation la plus difficile à obtenir pour réaliser la bande dessinée (tant au niveau du scénario qu'à celui, surtout, du dessin) fut celle de la plate-forme pétrolière offshore. Ce fut pour nous une longue recherche tous azimuts, sachant que les compagnies pétrolières, qui refusent de divulguer quoi que ce soit, n'ont jamais répondu à nos requêtes... Voici pourtant une des photos ayant servi de modèles à la plate-forme dessinée par Francis Nicole.

dimanche 1 mai 2011

Top Attaque-46e et dernière planche



Cette planche est la dernière de l'histoire Top Attaque mise en ligne sur le blog à raison d'une page par jour au cours des mois de mars et d'avril.